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Analyse de la procrastination

Analyse de la procrastination

Mamoun Moubarak Dribi

 

Le phénomène de la procrastination inhibe terriblement le potentiel de nombreuses personnes, qu’elles soient actives ou non. Il les empêche d’agir de manière pertinente, de planifier et d’exécuter une ou plusieurs actions et de les réaliser dans les délais qui leurs sont impartis. Les personnes qui souffrent de procrastination, atermoient la plupart du temps. Elles ont beau planifier et organiser un planning de travail, elles ont beaucoup de mal à le tenir et à le respecter.  


La plupart du temps, ce n’est qu’acculés et mis sous pression par un deadline serré que ses personnes parviennent à réaliser ce qu’il y a à faire, après mille peines. Hélas du fait de se savoir affecté de procrastination va perturber profondément la confiance en soi, tout en plongeant le sujet dans des états d’angoisse et d’anxiétés relativement astreignantes.

Le risque est de toujours stresser dès qu’un nouveau travail ou projet se présente. Souvent les personnes qui souffre de procrastination vont avoir une certaine appréhension, tout en ayant un discours fortement empreint de « négatif », avec un automatisme à faire des « contre-propositions » voire de propositions annexes ou connexes. Ils auront énormément de mal à se tenir au besoin ou à la demande telle qu’elle est formulée par l’Autre !!

La théorie psychanalytique donne des réponses à ce phénomène et permet même de le traiter. En fait, presque tous les théoriciens affirment qu’il s’agit là de quelque chose qui attient à la structure obsessionnelle. FREUD le premier en publiant « Inhibition, Symptôme, Angoisse » a mis à jour les lois qui sous-tendent l’hésitation et le doute. L’éminent LACAN dans le séminaire « l’angoisse », va expliciter de manière formelle ce qu’il en est de « l’atermoiement » et de l’hésitation.

Rappelons dans ce sens que la psychanalyse distingue l’acte de la vie quotidienne, l’acte psychanalytique, le passage à l’acte, l’acting out, et l’acte symptomatique, ce dernier subsume l’acte manqué, le mot d’esprit et le rêve.

 

Il est essentiel de comprendre que dans la problématique de la procrastination il est question d’acte actuel ou actualisation par rapport à quelque chose qui serait d’ordre virtuel. Comme le souligne le psychanalyste XavierAUDOUARD lors de son intervention au séminaire fermé de LACAN « L’acte », quand il nous dit : « C’est déjà un mécanisme qu’on peut aligner sur la série obsessionnelle, mais en tant qu’il accepte d’être acte, il ne peut pas accepter, en même temps, d’être représentation de lui agissant. »


Pour illustrer les propos de Xavier AUDOUARD quand il aborde cet aspect hautement sensible en rapport avec la dimension de représentation, regardons ensemble ce schéma produit par la Professeur LELEUMERVIEL Sylvie.


Nous pouvons voir ici du bas vers le haut différentes strates allant du Noumène au niveau le plus bas pour s’achever au niveau le plus haut où se situe le Pattern. C’est au second niveau en partant du bas, celui de l’entité-objet que va se poser le problème en termes de structures qui agissent au niveau de la procrastination. L’objet dont il est question dans ce schéma est en fait un objet métonymique et non un objet réel !! Il est ici question de la symbolisation, et de l’appréhension par l’esprit de quelque chose autour duquel va se cristalliser le corps de la signification.

C’est à ce niveau-là que va opérer l’incorporation, pour aboutir soit à l’assimilation ou au rejet Cf. Séminaire de LACAN « Le désir et son interprétation ». Rappelons que la notion du corps dans la théorie de LACAN désigne autre chose, que l’organisme physiologique de l’être humain. L’achoppement se produit ici, l’objet métonymique glisse et demeure insaisissable… Comme je l’ai souligné dans le propos du psychanalyste Xavier AUDOUARD, quand il dit : « …En tant qu’il accepte d’être acte, il ne peut pas accepter, en même temps, d’être représentation de lui agissant. ». Comme vous l’aurez remarqué, Il est question d’acceptation et de représentation. Mais de quelle représentation s’agit-il ? Ce n’est certainement pas de la représentation institutionnelle comme celle qu’incarne un représentant de l’état ou du gouvernement dans l’exercice de sa fonction. Ni non plus de la représentation théâtrale ou cinématographie !! Il s’agit de représentation structurelle, celle dont parle LACAN quand il nous dit : « Le signifiant c’est ce qui représente le sujet pour un autre signifiant ».

 

Le trouble se situe à ce niveau, et plus exactement au niveau de la conjonction de plusieurs structures, parmi elles nous trouvons :

le « Nom du père »,

le « point de capiton »,

la loi du signifiant

et le désir.



Il s’agit de cette difficile opération qui consiste à agripper un signifié par le signifiant (S/s) pour que la signification soit engendrée !! Opération quasi impossible, mais pas complétement. Cela sera rendu d’une certaine manière  par un autre biais indirect qui est celui de la métaphore paternelle. Lisons dans ce sens l’éminent LACAN :



Vous comprenez bien je l’espère maintenant que ce dont il est question au niveau de la procrastination, n’est pas uniquement le refus du sujet ou sa résistance face à tout ce qui pourrait constituer pour lui une astreinte ou une contrainte. Ni non plus une absence de méthodologie quant à la manière de gérer ses résolutions, ses objectifs ou sa volonté… Bien évidemment que ce genre de ravalement demeure utile voire nécessaire. Mais à condition de se placer au niveau du sujet véritable où se joue la problématique de la procrastination.

 

Il s’agit bel et bien d’une structuration où se mêlent plusieurs structures que j’espère vous avoir présenté aussi clairement que possible, et qui se situent bien au-delà de l’intelligence ou du savoir que l’on puisse avoir. Seule cette action de structuration pourra rendre possible le verrouillage du sujet sur un objet métonymique et ne restera pas éparpillé sur d’autres choix voire aucun choix du tout. Cet arrêt, ce choix définitif qui va frustrer le sujet de tous les autres choix qui se sont présentés à lui, fait appel à un acte primordiale : celui où il est question de « trancher ».

 

Car Il n’y a jamais de choix idéal.

 

Dès qu’il s’agit d’opérer ce choix, la tentation est prégnante voire obsédante d’aller chercher LE CHOIX qui serait « un choix idéal » que la faille s’ouvre sous les pieds de la personne qui procrastine, pour le faire tomber dans l’inertie totale. Pour parachever ce travail de compréhension et d’analyse que j’ai essayé de mener pour cerner la problématique de la procrastination, il est primordial d’intégrer l’impact de l’Idéal du moi, de l’Idéalisation, de l’Identification, de la crise Œdipienne et de la Castration.

 

A défaut de cette structuration, le sujet qui procrastine tombera toujours dans l’hésitation et le doute, c’est ce qui fera dire à Lacan : « Le sujet obsessionnel anticipe trop tard ».

 

A suivre…

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